Entretien avec Fatim Zahra Ammor, Ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Economie sociale et solidaire. Deux villes se démarquent particulièrement dans ce domaine. Casablanca est devenue la première destination touristique du pays en raison de sa vocation économique. Mais d’autres villes comme Rabat ou Tanger pourraient bientôt apparaître dans ce domaine également.
– Question :
Un événement comme Gitex illustre le potentiel du tourisme d’affaires au Maroc. Avez-vous une stratégie dédiée pour ce créneau ? Que prévoit votre feuille de route dans ce domaine ?
– Fatim Zahra Ammor : En tant que ministre du Tourisme, je suis ravie de l’essor des événements, comme le Gitex, qui témoignent de la capacité de notre pays à accueillir des rencontres d’envergure mondiale, et qui renforcent la position du Maroc en tant que hub du tourisme d’affaires dans la région. Le MICE (Meetings, Incentives, Conferences and Exhibitions) est un segment très important créateur de valeur, vecteur d’investissement et générateur de recettes en devises. Il a également pour vocation le rayonnement à l’international de la marque Maroc à l’instar des autres filières de l’offre touristique.
Dans la feuille de route 2023-2026, nous avons clairement mis l’accent sur le développement du secteur MICE, avec une filière thématique dédiée. Cette filière se fixe comme priorité de renforcer nos infrastructures pour élever le Maroc au rang de destination MICE de renommée mondiale et attirer de plus en plus d’événements d’envergure.
Deux villes se distinguent particulièrement dans cette filière étant donné leur capacité et leur positionnement. Casablanca, en raison de sa vocation économique, et Marrakech, comme première destination touristique du pays. Mais d’autres villes pourraient également émerger prochainement dans ce secteur comme Rabat ou Tanger.
Également, parmi les 14 projets locomotive initiés dans le cadre de la feuille de route 2023-2026, il est prévu la construction d’un Palais des congrès et d’un parc d’expositions à Marrakech et l’extension de l’Office des foires et expositions de Casablanca. Par ailleurs, le programme Go Siyaha, que nous avons lancé en février 2024, permettra la création d’un tissu économique de qualité qui bénéficiera à cette filière (mobilité, prestation de service, restauration et animation, plateformes, etc.), afin de hisser le niveau de l’expérience pour ce profil de touristes qui voyagent beaucoup et qui sont exigeants.
Aussi, nous avons initié 4 programmes en collaboration avec le secteur privé, axés sur l’amélioration de la qualité de service par le biais de la formation. Toutes ces initiatives, que nous suivons de près, seront à même de renforcer le capital humain impliqué dans la chaine de valeur et la gestion des événements MICE, afin de garantir des normes de qualité élevées et une excellence opérationnelle.
Quelles sont les statistiques officielles du tourisme d’affaires au Maroc ? Recense-t-on le nombre d’événements qu’abrite le pays ? Mesure-t-on précisément leur impact en termes de nuitées et de recettes ?
Le tourisme d’affaires joue un rôle crucial dans l’économie marocaine, avec 1.131.000 touristes d’affaires recensés en 2023, contribuant aux 105 milliards de dirhams de recettes de voyage en devises. Les principales villes qui contribuent à ce segment sont Casablanca, en tant que capitale économique du pays, qui attire par ses infrastructures modernes et ses installations de conférence de premier ordre, Rabat qui attire de plus en plus de manifestations grâce à ses infrastructures développées, mais aussi grâce à ses sites culturels exceptionnels, Tanger, avec ses connexions de transport internationales et son parc industriel en expansion, et Marrakech qui dispose de capacités d’accueil qui lui permettent d’abriter de grands événements d’envergure.
Dans l’ensemble, les prochaines années devraient connaître une forte croissance des marchés MICE traditionnels et émergents, soutenue par l’amélioration des conditions économiques mondiales et l’émergence de nouvelles industries. Une attention particulière va être accordée à cette filière pour suivre les indicateurs de performance de manière plus ciblée et adapter l’offre.
Nous sommes sur une trajectoire positive sur cette filière, mais il reste encore beaucoup à faire. Il est nécessaire de renforcer les infrastructures majeures, d’encourager la création de centres de conférences modernes, de parcs d’expositions, de capacités d’hébergement additionnelles, de services aéroportuaires de qualité, de maîtriser les moyens de mobilité, d’étoffer l’offre de restauration et d’initier de nouvelles activités d’animation et de loisirs adaptées.
Marrakech reste la seule destination capable d’abriter des événements de grande ampleur. Et encore sa capacité se retrouve rapidement saturée, un plan dans ce sens ?
Il est indéniable que Marrakech émerge comme une destination phare pour accueillir des événements de grande ampleur. À titre d’exemple le Royaume a eu le prestige d’accueillir à Marrakech, en octobre 2023, les assemblées annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, en présence de plus de 14.000 participants de 150 pays, comprenant des institutions publiques internationales et des leaders du monde entier : gouverneurs des banques centrales, ministres, dirigeants du secteur privé, représentants de la société civile, jeunes leaders, universitaires, etc. Ils étaient tous réunis pendant une semaine et avec une organisation, une logistique et une sécurité irréprochables.
Cependant, il est vrai que la capacité d’accueil de la région peut rapidement atteindre ses limites en raison de sa demande exponentielle. Pour remédier à cette situation et garantir la viabilité à long terme de Marrakech en tant que destination MICE de renommée mondiale, nous avons besoin comme je l’ai dit et comme prévu dans notre feuille de route d’un palais des congrès de 10.000 places et un parc d’expositions. La signature du contrat d’application régional est programmée dans les prochains jours et devrait permettre de lancer ces chantiers qui sont très attendus par les professionnels.
Avez-vous une vision pour créer de nouvelles destinations d’affaires ?
Le marché du MICE, en constante évolution et de plus en plus exigeant, connaît une reprise significative, stimulée par une concurrence accrue, car plusieurs pays sont en avance sur ce segment de marché. Le Royaume offre une stabilité politique sans égale dans la région, des liens diplomatiques solides, un climat exceptionnel toute l’année, une proximité géographique avec l’Europe, des aéroports bien situés, un riche patrimoine culturel et naturel, ainsi que des offres touristiques en pleine expansion. Au Maroc, plusieurs villes bénéficient de nombreux attributs qui en font des destinations idéales pour organiser les événements.
Parmi ces villes, Rabat, avec son mélange unique de modernité et de tradition, et Tanger, avec sa position géographique stratégique de point de connexion entre l’Europe et l’Afrique, offrent des infrastructures et des atouts culturels qui les positionnent avantageusement sur le marché du MICE.
À titre d’exemple, le Forum annuel du Syndicat des entreprises du Tour Operating français (SETO), qui s’est tenu récemment à Rabat en présence des dirigeants des plus grands tour-opérateurs français, a connu un énorme succès, mettant en lumière les capacités de la ville à organiser des événements de grande envergure et démontrant son potentiel en tant que destination MICE de premier plan.
Source :